Via Futura: Tram extension from Nations
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Évolution des pratiques de mobilité à Genève : à chacun sa manière de bouger
Dans l’article précédent, nous avons pu constater que la réalisation de l’extension du tram Nations – Grand-Saconnex (TNGS) s’inscrit à Genève dans des pratiques de mobilité en pleine évolution. Ces changements doivent dès lors être pris en compte dans l’évaluation des enjeux spécifiques de ce projet de tram entre Nations et Grand-Saconnex. Parmi ceux-ci, l’augmentation du temps passé dans les transports ou encore la tendance progressive à la démotorisation des ménages (moins de voitures), particulièrement visible en centre d’agglomération.
Cette tendance n’est pas étrangère à l’utilisation croissante des « outils numériques du travail ». En effet, grâce à l’Internet mobile par exemple, à condition d’avoir la possibilité de s’assoir, de disposer d’une table et d’une prise électrique, les utilisateurs des transports en commun profitent de plus en plus de leurs déplacements pour travailler. Qui plus est, ces outils numériques – ainsi qu’une évolution des valeurs, permettent de faire émerger de nouvelles pratiques économiques basées sur le partage (plateformes de co-voiturage, de voitures partagées, etc.).
Le rapport à la possession d’un véhicule individuel est en train d’évoluer et favorise en ce sens la « multimodalité », soit l’utilisation de différents modes de transport. La réalisation d’un tram comme nouvelle infrastructure de transports en commun devrait permettre, dans cette optique, une meilleure articulation entre ces différents modes et ces nouvelles attentes. Et ce, d’autant plus pour les communes proches du secteur du futur tram qui disposent actuellement d’un faible niveau de desserte en matière de transports en commun (Pregny-Chambesy, Bellevue, etc.). Ainsi, une étude récente de l’EPFL montre que les habitants de la couronne française du Grand Genève seraient intéressés et disposés à délaisser leur voiture s’il existait une réelle offre alternative (Kaufmann et. al., 2019).
Toutefois, il ne suffit pas de créer l’offre pour que la population décide de passer d’un mode de déplacement à un autre. Comme la littérature scientifique le montre, le choix en faveur d’un mode de transport ne dépend pas uniquement de calculs basés sur le coût et l’efficacité de chacun d’entre eux. Dans ce cadre, ainsi que l’a démontré une étude réalisée en 2011 (les résultats d’une nouvelle étude seront publiés à l’automne 2019) par le Laboratoire de Sociologie Urbaine de l’EPFL, le futur tram doit composer avec plusieurs contraintes.
A Genève et dans son agglomération, deux faits saillants en effet ont été mis en lumière. D’une part, paradoxalement, même si la voiture est plus utilisée à Genève qu’à Berne, ce mode de transport y a plus mauvaise presse que dans la ville fédérale (71% d’image positive à Genève contre 82% à Berne). D’autre part, l’image des transports publics genevois est particulièrement négative à Genève (35%) en comparaison avec Lausanne (26%) et Berne (17%). Lausanne, à la différence de Genève, semble ainsi avoir globalement bénéficié de l’effet du métro M2 sur l’image des transports en commun. C’est la lenteur attribuée aux transports publics à Genève qui semble poser problème. Mais la mise en service du Léman Express en décembre pourrait participer à changer ce point de vue (Kaufmann et. al., 2019)
En conclusion, ces observations permettent de souligner d’importants enjeux en termes d’aménagement et de report de la voiture vers les autres modes de transport. En plus de veiller à un service de qualité répondant aux nouveaux besoins et aux pratiques de différents types d’usagers, le tram devra faire le lien entre les territoires du centre de Genève et les territoires des communes suburbaines. En effet, comme nous le verrons dans l’article suivant, la route de Ferney représente une délimitation spatiale mais aussi sociale entre ces différents territoires.
Pour en savoir plus : voir la section consacrée aux différents profils d’usagers de la route de Ferney. Et vous, quelles sont vos habitudes de déplacement ?
Sources des données :
Kaufmann, V. (dir). (2019). Analyse prospective des logiques de choix modal auprès de la population action de l’Union des Villes Genevoises, Rapport UVG Cahier du laSUR 28b : Lausanne.
Kaufmann, V. (2003). Pratiques modales des déplacements de personnes en milieu urbain : des rationalités d’usage à la cohérence de l’action publique. Revue d’économie régionale et urbaine 2003/1 : 39-58.
Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), 2016